vendredi 9 décembre 2011

Entre le ciel et moi…

C’est vrai que je reste un peu fâchée avec le ciel depuis l’annonce de mon cancer.
Fâchée avec le ciel et aussi avec tous ceux que j’aime là-haut, censés me protéger, censés jouer mes anges gardiens.  Surtout qu’ils sont nombreux ! Peuvent même se relayer ! Enfin c'est ce que je croyais.
Depuis longtemps, là-haut, il y a mes parents (j’y ai fait pour la première fois allusion dans un précédent billet). Il y a l'un de mes meilleurs amis de jeunesse, mort à 25 ans, dans un accident de voiture,  lui aussi.
Il y a le père de ma fille, mort d’un cancer il y a un peu plus de trois ans. Le père de ma fille était plus âgé que moi. 14 ans de plus. Il est mort à 58 ans après avoir menée une « belle vie », à sa façon, à son rythme : vif, rapide. Une vie aventureuse, risquée… mais belle.
Je ne voudrais pas trop parler de lui sur ce blog, d’abord par respect pour l’homme, plus jeune, avec lequel je partage ma vie aujourd’hui. Aussi parce que le père de ma fille a toujours espéré, comme une dernière volonté,  même si c’était difficile à entendre sur le moment car je l'aimais très fort… enfin, il m'a   fait promettre de reconstruire ma vie. Ma vie amoureuse. Ma vie de femme. Et de bien m'occuper de notre fille. 
Alors quand mon Chéri est arrivé dans ma vie,  deux ans plus tard, de manière aussi inattendue que naturelle, j’ai pensé (et je le pense toujours) que c’était un cadeau qui m’arrivait tout droit du ciel !! 
Alors vous comprenez pourquoi je suis un peu fâchée avec le ciel. Même si je n’oublie pas tous ceux qui sont là-haut, j'étais si heureuse ces derniers temps. En harmonie avec mon passé et mon présent. Ce cancer est tombé comme une menace. Pour moi, pour ma fille. Et aussi pour mon chéri. Oui jen ai voulu très fort au Ciel. Je me suis sentie trahie. Abandonnée.

j’avais oublié…

Quand le père de a fille était au plus mal, je suis allée voir un prêtre pour lui parler. Parler de lui surtout. De sa maladie mais aussi de son tempérament. De l'homme qu’il représentait, pour moi et mais aussi et surement pour d’autres. 
Après m'avoir écouté longuement, il a sorti un livre de sa bibliothèque, en me disant : "voilà ce que vos mots évoquent pour moi…" "Et il a lu un poème. Un poème que nous avons lu un mois plus tard à la messe d’enterrement du père de ma fille, qui ne pratiquait plus beaucoup mais qui était profondément croyant et mystique. 
Ce très beau texte, je l’avais enfoui loin dans ma mémoire. Et j’ai été touchée l’autre soir, quand la sœur du père ma fille me l'a renvoyé, comme un cadeau, comme un réveil qui sonne à nouveau, comme un rappel... Un appel. Un sourire...


le Poème…

Une nuit, j’ai eu un songe.
J’ai rêvé que je marchais le long d’une plage, en
compagnie du Seigneur.

Dans le ciel apparaissaient, les unes après les autres,
toutes les scènes de ma vie.

J’ai regardé en arrière et j’ai vu qu’à chaque
scène de ma vie, il y avait deux paires de traces sur le sable :
L’une était la mienne, l’autre était celle du Seigneur.

Ainsi nous continuions à marcher, jusqu’à ce que tous
les jours de ma vie aient défilé devant moi.

Alors je me suis arrêté et j’ai regardé en arrière.
J’ai remarqué qu’en certains endroits, il n’y avait
qu’une seule paire d’empreintes, et cela correspondait
exactement avec les jours les plus difficiles de ma vie,
les jours de plus grande angoisse, de plus grande peur
et aussi de plus grande douleur.

Je l’ai donc interrogé : " Seigneur… tu m’as dit que tu
étais avec moi tous les jours de ma vie et j’ai accepté
de vivre avec Toi. Mais j’ai remarqué que dans les pires
moments de ma vie, il n’y avait qu’une seule trace de pas.
Je ne peux pas comprendre que tu m’aies laissé seul
aux moments où j’avais le plus besoin de Toi. « Et le Seigneur répondit : » Mon fils, tu m’es tellement
précieux ! Je t’aime ! Je ne t’aurais jamais abandonné,
pas même une seule minute !

Les jours où tu n’as vu qu’une seule trace de pas sur le
sable, ces jours d’épreuves et de souffrances, eh bien :
c’était moi qui te portais. "

Du poète brésilien Adémar de Barros


Marcher sur le sable..

fâchée encore un peu…

Même si je reste encore un peu fâchée avec le ciel et tous ceux qui j’aime là-haut, j’aspire à me réconcilier.

J’en profite pour remercier tous ceux qui croient, qui prient, et qui m’associent à leurs prières. Je crois beaucoup à cela, à la prière, à la pensée, à la force qui nous unit.

J’en profite pour remercier certains d’entre vous :

Les parents de mon chéri dont la foi est belle et précieuse.

Thierry B, qui m’a écoutée et soutenue à des moments pas faciles, après la mort du père de ma fille. Si vous vous voulez en savoir plus sur le parcours de Thierry, je vous recommande de lire son livre « Catholique anonyme » ou/et de vous rendre sur son blog : http://bizot.blog.croire.com/

Mes cousins habités par beaucoup de « spiritualité », Pierre, Muriel, Marie-Astrid, Laure, Ch.h, Isa, Anne, ma tante, Claire, Emmanuel, et tant d’autres encore…

Sans vouloir jouer les « journalistes peoples », mais puisque mes dernières occupations avant mon arrêt de travail consistaient à voir des films en avant-première, à interviewer acteurs et réalisateurs, et à faire quelques critiques cinés pour M6, je pense aussi à certaines de mes dernières et belle rencontres dans le monde du cinéma :

Alors…Je pense à Michaël Lonsdale dont la foi est immense… J’ai eu la chance, l’honneur même, de le rencontrer pour son dernier film (non pas « Des hommes et des Dieux ») mais « Les hommes libres », un très beau film sur une page d’histoire souvent méconnue du rôle joué par la Mosquée de Paris pendant la Seconde guerre mondiale. Le recteur, magistralement interprété par Michel Lonsdale ayant tout fait pour sauver des juifs et abriter des résistants.
Lors de cet entretien, quand je lui ai posé la question, à votre avis, de quoi manque t-on aujourd’hui ? Il m’a répondu, de sa voix singulière et avec son regard qui vient de très loin : « On manque de douceur, de beauté, de générosité, de spiritualité et surtout de temps… »

Je pense à Joann Sfar, dessinateur et cinéaste (Le chat du rabbin)  qui n’est ni athée, ni croyant, disons plutôt agnostique. Mais qui nous pose les bonnes questions et nous invite à nous comprendre entre juifs, arabes, catholiques… Cet homme est bouillonnant d’idées, pétri d’intelligence, et simple avec ça. Très belle rencontre. Son blog : http://www.joann-sfar.com/

Je pense à Gérard Depardieu, personnage à multiples facettes, mais dont l’âme est poétique. Et je n’oublierai jamais cette phrase, prononcée lors de mon interview avec lui à l'occasion de la sortie du film « Mammouth ». Il faisait allusion, dans le film, à son amour d’antan, rôle tenu par Isabelle Adjani, morte  tragiquement dans un accident de moto...
Et pour évoquer la mort lors de cet entretien, il a juste dit :« On a tous besoin d’une Isabelle Adjani derrière soi. D’un joli fantôme derrière soi … »
J’ai adoré cette idée. Et je me la suis appropriée, un temps…

Je pense à ma toute dernière interview faite avec François Cluzet et Omar Sy pour leur film « Intouchables ». J’ai été profondément touchée par l’énergie et la profondeur de ces deux acteurs, et surtout sur ce qu’ils ont pu dire sur leur rencontre avec Philippe Pozzo di Borgo, dont le film est inspiré. Un homme solaire et profondément croyant. Je ne l’ai pas rencontré, mais récemment j’ai appris qu’il avait été un très bon ami d'enfance du père de ma fille. J'en ai été infiniment touchée....

Je pense à a grand-mère qui n’a jamais perdu la foi, mais qui est la seule à qui je ne dit pas et ne dirai pas ce qui m’arrive. A 100 ans, ça lui ferait trop de peine.

Je pense à beaucoup d’autres…
Mais je pense vraiment très très très fort à vous tous ce soir…

Une très bon wek end à tous,

CC

PS : Si quelqu’un est libre le 26 décembre pour faire un aller-retour avec moi en Normandie à Deauville en voiture (j’ai la voiture et j’invite à déjeuner au bord de la mer, si, si). Le but, accompagner ma fille qui passera une semaine de vacances là-bas. On partirai vers 10h du matin, on déjeunerai sur place, on irait voir la mer, et on rentrerai en fin de journée….quelqu’un (qui conduit) est-il tenté !!??

PSS : merci à T2A pour l’écharpe ! Superbe !

3 commentaires:

  1. Juste parce que des fois, le ciel il donne aussi ça :
    http://1.bp.blogspot.com/_Ff8Hg-VHSw4/TNXZHRqcGII/AAAAAAAAAb4/RjK0py44Kq0/s1600/IMGP8244.JPG

    C'est loin de ta jolie image à toi, beaucoup plus poétique, plus spirituelle.
    Pour moi un arc-en-ciel c'est cet effet d'optique, le 'truc' de la lumière qui se divise au travers d'un prisme... Mais maintenant que j'y pense, je suppose qu'on peut aussi dire que le ciel est magique et beau, et que la nature fait bien les choses. Qui n'aime pas les arcs-en-ciel?...

    With music, please... http://www.youtube.com/watch?v=oWtNtO5ELQw&feature=relmfu Lily

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  2. Difficile de commenter un bulletin aussi poignant... ça me rappelle juste la dernière conversation que j'ai eu avec mon ambulancier : je lui disais que pour mon opération je faisais une totale confiance à mes chirurgien, ensuite on prie ce à quoi on croit... il m'a demandé si je priais... je lui ai répondu que j'étais fâchée avec le ciel depuis mon premier cancer, mais que je laissais les gens compétents le faire pour moi (j'ai entre autre un moine de l'abbaye de Citteaux et ses frères qui prient pour moi). J'ai foi en l'être humain et en la médecine, et si Dieu existe, quand le temps sera venu, il me pardonnera d'avoir perdu la trace de ses pas parmi toutes les traces des gens qui m'ont soutenu lors des jours difficiles. Et comme l'a dit mon idole : "si le ciel a un enfer, le ciel peut bien m'attendre..."
    bonne continuation
    Adeline

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  3. ne reste pas fâchée longtemps avec le ciel même si tu en ressens toute la légitimité. c'est facile à dire quand on n'est pas à ta place. mais la vie te tient au creux de sa main comme tu la prends au creux de la tienne. ces émotions aussi dures soient elles. aussi douces. palpitent en toi. en nous tous pour toi modestement. et toutes les prières portées là-haut sont fécondes et pleines de cette palpitation. vivante et intime. entre le ciel et nous. entre le ciel et toi. rassures toi.

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