la Bonbonnière...
J’ai passé plusieurs
années de ma vie dans le 5e arrondissement de Paris, entre 20 et 40
ans.
Je n’y étais pas tout le
temps mais souvent. J’avais rue Gay-Lussac, un studio très haut de
plafond avec une mezzanine que j’habitais, où que je louais, en fonction des
périodes de ma vie.
Etrangement, ce studio était (est toujours) situé juste en face de l’Institut
Curie où je me fais soigner actuellement. Autant dire que je connais ce
quartier comme ma poche ! C’est aussi là que ma fille est née ! C'est vous dire si j'y ai vécu quelques uns de mes plus beaux moments...
Alors quand je suis tombée
« malade » et que j’ai du revenir très régulièrement dans le quartier
pour me traiter, le 5e est redevenu pour moi une sorte de « petit
cocon » avec un décors familier et des « gens » bons pour moi.
Bienveillants. Des gens avec lesquels j’avais tissé des liens plus forts encore
que je ne le croyais.
Les gens
du 5e ....
le sourire d'Odette...
D’abord il y a Odette.
Quand j’ai dit à Odette
que j’étais « malade », Odette a pleuré. Quand j’ai dit à Odette que
j’allais mieux, que j’étais en voie de guérison, Odette a pleuré.
Quand j’ai dit à Odette
que je voulais mettre une photo d’elle sur mon « blog », Odette était
très émue (même si elle ne le lira jamais car elle ne va jamais sur Internet)…
et, elle encore pleuré. Pourtant, Odette pleure rarement. Odette travaille tout
le temps, même le samedi, même le lundi, même certains jours fériés. Odette ne ferme son café que le dimanche. Et si on regarde bien à travers les grilles,
elle en profite pour faire un gros ménage.
Odette a un mari, des
enfants et des petits enfants. Mais les petits enfants, elle s’en occupera
quand elle sera à la retraite. Odette a toujours dit ça. Et quand Odette dit
quelque chose, elle le fait !
Odette fait des omelettes
et des croque-monsieur trop bons ! Odette cuisine sur une toute petite
cuisinière à gaz, comme au camping, mais elle sort ses 40 couverts tous les
jours !
Nelly, la serveuse l’aide
beaucoup, et Jacky, son mari, fait les courses à Rungis ou chez Metro.
Odette est toujours souriante.
Odette connaît des morceaux
de vie de chacun de ses clients mais elle reste discrète.
Moi, j’ai pu confier beaucoup de choses à Odette. D’abord mes clefs, mais aussi mes joies, mes
peines. Je ne lui disais pas toujours pourquoi j’avais du chagrin, mais elle
était là. Elle me servait mon petit crème ou mon jus d’orange pressé et avec un
clin d’œil ajoutait : « Allez
courage ma p’tite Caro, ça va aller »…
Dans son café, Odette a un
petit carnet derrière son bar. Et dans son carnet Odette à une photo de moi
enceinte jusqu’au cou ! Elle a aussi une photo de ma fille bébé.
Quand j’ai accouché Odette
a pleuré. Odette aime beaucoup ma fille. Elle a toujours eu des attentions pour
elle.
Son café s’appelle la
« Bonbonnière » et au-dessus du frigo il y une grosse bonbonnière en
verre avec des bonbons kréma.
Maintenant, quand je
passe, avant ou après mes traitements Odette m’oblige toujours à prendre trois
bonbons pour ma fille. Trois rouges : un à la fraise, un à la cerise, un
dernier à la framboise…
J’aime beaucoup Odette. Ma fille aime beaucoup ses bonbons !
Et puis il y à Pascal, le
coiffeur.
Quand pascal a su que
j’étais « malade », il a dit : "t’inquiète pas pour tes cheveux, dès
que tu en auras envie ou besoin, passe me voir, je m’occuperai de toi". Et il
m’a fait un gros bisous et a payé mon café au comptoir. J’étais super touchée.
Et puis il y a Pascale,
la fleuriste.
J’adore sa boutique, les
couleurs, les fleurs, les matières, elle a un goût extraordinaire.
Quand j’ai dit à Pascale
que j’étais « malade » car elle s’étonnait de me voir aussi souvent
repasser dans le quartier, Pascale a pleuré. Elle a pleuré, et je sais
pourquoi, mais je ne vous le dirai pas. Mais elle m’a tout de suite dit :
« je ne devrai pas pleurer mais tu
sais pourquoi je pleure…et non, hein, Caro, faut pas penser à ça. Je suis sûre
que tu vas guérir ». Et puis elle a ajouté : « Si un jour tu as le cafard, et aussi un peu de temps, vient
travailler avec moi quelques heures au magasin. Tu verras, les fleurs ça te
fera du bien, elles te consoleront ! ». Je ne m’attendais pas à
cette invitation. Je n’y ai pas encore répondu, je le regrette, mais j’ai trouvé ses mots très beaux.
Voilà, il y a aussi le
pompiste, le p’tit portugais qui tient l’épicerie du coin ouverte plus tard que
tard, le boulanger, Tatou qui a gardé ma fille à la sortie de la maternelle pendant
un an, la pédiatre, des habitants du quartier que je reconnais dès qu’ils sortent d’un porche…
Il y aussi le jardin du
Luxembourg et le jardin des Plantes où j’aime tant me promener et continuer à
accumuler les souvenirs…
Vive les « gens du 5e » !
CC